«Ilusiones perdidas» en francés
Illusions Perdues
44 votos
â Autor | HonorĂ© de Balzac |
đ Paginas | 773 |
â° Tiempo de leer | 40 horas |
đĄ Fecha de publicaciĂłn | 1843 |
đ Idioma original | FrancĂ©s |
đ Tipo | Novela |
đ GĂ©neros | Prosa, PsicolĂłgica, Realismo, Social |
đ Secciones | Novela psicolĂłgica , Novela realista , Novela social |
Tabla de contenido
Traducciones
Illusions Perdues: leer el libro original
Ă MONSIEUR VICTOR HUGO.
Vous qui, par le privilĂ©ge des RaphaĂ«l et des Pitt, Ă©tiez dĂ©jĂ grand poĂšte Ă lâĂąge oĂč les hommes sont encore si petits, vous avez, comme Chateaubriand, comme tous les vrais talents, luttĂ© contre les envieux embusquĂ©s derriĂšre les colonnes, ou tapis dans les souterrains du Journal. Aussi dĂ©sirĂ©-je que votre nom victorieux aide Ă la victoire de cette Ćuvre que je vous dĂ©die, et qui, selon certaines personnes, serait un acte de courage autant quâune histoire pleine de vĂ©ritĂ©. Les journalistes nâeussent-ils donc pas appartenu, comme les marquis, les financiers, les mĂ©decins et les procureurs, Ă MoliĂšre et Ă son ThĂ©Ăątre ? Pourquoi donc la ComĂ©die Humaine, qui castigat ridendo mores, excepterait-elle une puissance, quand la Presse parisienne nâen excepte aucune ?
Je suis heureux, monsieur, de pouvoir me dire ainsi
Votre sincĂšre admirateur et ami,
DE BALZAC.
Illusions Perdues. Honoré De Balzac
LES DEUX POĂTES
Ă lâĂ©poque oĂč commence cette histoire, la presse de Stanhope et les rouleaux Ă distribuer lâencre ne fonctionnaient pas encore dans les petites imprimeries de province. MalgrĂ© la spĂ©cialitĂ© qui la met en rapport avec la typographie parisienne, AngoulĂȘme se servait toujours des presses en bois, auxquelles la langue est redevable du mot faire gĂ©mir la presse, maintenant sans application. Lâimprimerie arriĂ©rĂ©e y employait encore les balles en cuir frottĂ©es dâencre, avec lesquelles lâun des pressiers tamponnait les caractĂšres. Le plateau mobile oĂč se place la forme pleine de lettres sur laquelle sâapplique la feuille de papier Ă©tait encore en pierre et justifiait son nom de marbre. Les dĂ©vorantes presses mĂ©caniques ont aujourdâhui si bien fait oublier ce mĂ©canisme, auquel nous devons, malgrĂ© ses imperfections, les beaux livres des Elzevier, des Plantin, des Alde et des Didot, quâil est nĂ©cessaire de mentionner les vieux outils auxquels JĂ©rĂŽme-Nicolas SĂ©chard portait une superstitieuse affection ; car ils jouent leur rĂŽle dans cette grande petite histoire.
Ce SĂ©chard Ă©tait un ancien compagnon pressier, que dans leur argot typographique les ouvriers chargĂ©s dâassembler les lettres appellent un Ours. Le mouvement de va-et-vient, qui ressemble assez Ă celui dâun ours en cage, par lequel les pressiers se portent de lâencrier Ă la presse et de la presse Ă lâencrier, leur a sans doute valu ce sobriquet. En revanche, les Ours ont nommĂ© les compositeurs des Singes, Ă cause du continuel exercice quâils font pour attraper les lettres dans les cent cinquante-deux-petites cases oĂč elles sont contenues. Ă la dĂ©sastreuse Ă©poque de 1793, SĂ©chard, ĂągĂ© dâenviron cinquante ans, se trouva mariĂ©. Son Ăąge et son mariage le firent Ă©chapper Ă la grande rĂ©quisition qui emmena presque tous les ouvriers aux armĂ©es. Le vieux pressier resta seul dans lâimprimerie dont le maĂźtre, autrement dit le NaĂŻf, venait de mourir en laissant une veuve sans enfants. LâĂ©tablissement parut menacĂ© dâune destruction immĂ©diate : lâOurs solitaire Ă©tait incapable de se transformer en Singe ; car, en sa qualitĂ© dâimprimeur, il ne sut jamais ni lire ni Ă©crire. Sans avoir Ă©gard Ă ses incapacitĂ©s, un ReprĂ©sentant du Peuple, pressĂ© de rĂ©pandre les beaux dĂ©crets de la Convention, investit le pressier du brevet de maĂźtre imprimeur, et mit sa typographie en rĂ©quisition. AprĂšs avoir acceptĂ© ce pĂ©rilleux brevet, le citoyen SĂ©chard indemnisa la veuve de son maĂźtre en lui apportant les Ă©conomies de sa femme, avec lesquelles il paya le matĂ©riel de lâimprimerie Ă moitiĂ© de la valeur. Ce nâĂ©tait rien. Il fallait imprimer sans faute ni retard les dĂ©crets rĂ©publicains. En cette conjoncture difficile, JĂ©rĂŽme-Nicolas SĂ©chard eut le bonheur de rencontrer un noble Marseillais qui ne voulait ni Ă©migrer pour ne pas perdre ses terres, ni se montrer pour ne pas perdre sa tĂȘte, et qui ne pouvait trouver de pain que par un travail quelconque. Monsieur le comte de Maucombe endossa donc lâhumble veste dâun prote de province : il composa, lut et corrigea lui-mĂȘme les dĂ©crets qui portaient la peine de mort contre les citoyens qui cachaient des nobles ; lâOurs devenu NaĂŻf les tira, les fit afficher ; et tous deux ils restĂšrent sains et saufs. En 1795, le grain de la Terreur Ă©tant passĂ©, Nicolas SĂ©chard fut obligĂ© de chercher un autre maĂźtre Jacques qui pĂ»t ĂȘtre compositeur, correcteur et prote. Un abbĂ©, depuis Ă©vĂȘque sous la Restauration et qui refusait alors de prĂȘter le serment, remplaça le comte de Maucombe jusquâau jour oĂč le Premier Consul rĂ©tablit la religion catholique. Le comte et lâĂ©vĂȘque se rencontrĂšrent plus tard sur le mĂȘme banc de la Chambre des Pairs. Si en 1802 JĂ©rĂŽme-Nicolas SĂ©chard ne savait pas mieux lire et Ă©crire quâen 1793, il sâĂ©tait mĂ©nagĂ© dâassez belles Ă©toffes pour pouvoir payer un prote. Le compagnon si insoucieux de son avenir Ă©tait devenu trĂšs-redoutable Ă ses Singes et Ă ses Ours. Lâavarice commence oĂč la pauvretĂ© cesse. Le jour oĂč lâimprimeur entrevit la possibilitĂ© de se faire une fortune, lâintĂ©rĂȘt dĂ©veloppa chez lui une intelligence matĂ©rielle de son Ă©tat, mais avide, soupçonneuse et pĂ©nĂ©trante. Sa pratique narguait la thĂ©orie. Il avait fini par toiser dâun coup dâĆil le prix dâune page et dâune feuille selon chaque espĂšce de caractĂšre. Il prouvait Ă ses ignares chalands que les grosses lettres coĂ»taient plus cher Ă remuer que les fines ; sâagissait-il des petites, il disait quâelles Ă©taient plus difficiles Ă manier. La composition Ă©tant la partie typographique Ă laquelle il ne comprenait rien, il avait si peur de se tromper quâil ne faisait jamais que des marchĂ©s lĂ©onins. Si ses compositeurs travaillaient Ă lâheure, son Ćil ne les quittait jamais. Sâil savait un fabricant dans la gĂȘne, il achetait ses papiers Ă vil prix et les emmagasinait. Aussi dĂšs ce temps possĂ©dait-il dĂ©jĂ la maison oĂč lâimprimerie Ă©tait logĂ©e depuis un temps immĂ©morial. Il eut toute espĂšce de bonheur : il devint veuf et nâeut quâun fils ; il le mit au lycĂ©e de la ville, moins pour lui donner de lâĂ©ducation que pour se prĂ©parer un successeur ; il le traitait sĂ©vĂšrement afin de prolonger la durĂ©e de son pouvoir paternel ; aussi les jours de congĂ© le faisait-il travailler Ă la casse en lui disant dâapprendre Ă gagner sa vie pour pouvoir un jour rĂ©compenser son pauvre pĂšre, qui se saignait pour lâĂ©lever. Au dĂ©part de lâabbĂ©, SĂ©chard choisit pour prote celui de ses quatre compositeurs que le futur Ă©vĂȘque lui signala comme ayant autant de probitĂ© que dâintelligence. Par ainsi, le bonhomme fut en mesure dâatteindre le moment oĂč son fils pourrait diriger lâĂ©tablissement, qui sâagrandirait alors sous des mains jeunes et habiles. David SĂ©chard fit au lycĂ©e dâAngoulĂȘme les plus brillantes Ă©tudes. Quoiquâun Ours, parvenu sans connaissances ni Ă©ducation, mĂ©prisĂąt considĂ©rablement la science, le pĂšre SĂ©chard envoya son fils Ă Paris pour y Ă©tudier la haute typographie ; mais il lui fit une si violente recommandation dâamasser une bonne somme dans un pays quâil appelait le paradis des ouvriers, en lui disant de ne pas compter sur la bourse paternelle, quâil voyait sans doute un moyen dâarriver Ă ses fins dans ce sĂ©jour au pays de Sapience. Tout en apprenant son mĂ©tier, David acheva son Ă©ducation Ă Paris. Le prote des Didot devint un savant. Vers la fin de lâannĂ©e 1819 David SĂ©chard quitta Paris sans y avoir coĂ»tĂ© un rouge liard Ă son pĂšre, qui le rappelait pour mettre entre ses mains le timon des affaires. Lâimprimerie de Nicolas SĂ©chard possĂ©dait alors le seul journal dâannonces judiciaires qui existĂąt dans le DĂ©partement, la pratique de la PrĂ©fecture et celle de lâĂvĂȘchĂ©, trois clientĂšles qui devaient procurer une grande fortune Ă un jeune homme actif.
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